Après près d’une décennie d’études à Boston et à New York, ainsi qu’une année de voyage en Europe, Jack Humphrey est revenu dans sa ville natale de Saint John, au Nouveau-Brunswick, où il a commencé à peindre les habitants, les paysages urbains et les paysages naturels dans ce nouveau style. Cela marquait une rupture avec les méthodes traditionnelles employées par les artistes pour représenter et présenter cette région. L’œuvre de Humphrey ne reposait pas nécessairement sur des représentations réalistes de ses sujets, mais mettait l’accent sur la composition des éléments formels de l’art – la ligne, la couleur, la forme – ainsi que sur l’expérimentation des matériaux et des techniques. Ce changement de vision esthétique a contribué à amorcer, dans la province, un extraordinaire épanouissement artistique au cours du deuxième quart du XXᵉ siècle.
Le Musée du Nouveau-Brunswick possède un important ensemble d’environ 800 œuvres de Humphrey : plus de 400 dessins, 300 peintures, une quarantaine de pastels, près de vingt estampes originales et sept carnets de croquis. Cette vaste collection offre une occasion sans précédent de comprendre l’évolution de sa vision créative, depuis ses années d’étudiant au début des années 1920 jusqu’à la dernière peinture qu’il a réalisée en plein air, en octobre 1966. Disposer d’un vaste échantillon de l’œuvre de Humphrey permet au Musée du Nouveau-Brunswick d’être un centre d’étude avancée de la carrière et de la production artistique de l’un des artistes les plus importants du Canada.
Entre 1931 et 1967, le nom de Humphrey devint synonyme de vues à l’aquarelle de Saint John et des villes et villages le long de la côte de Fundy, ainsi que des rivières Saint John (Wolastoq) et Kennebecasis. Alors que sa réputation nationale croissait grâce à la qualité de son travail, ces représentations devinrent la manière dont le Nouveau-Brunswick était perçu et compris à travers le pays. Peu de temps après son retour de voyage, il dirigea des cours d’art pour enfants où il trouva des modèles pour une puissante série de portraits qui obtinrent une large reconnaissance. Une reconnaissance nationale au début des années 1950 et une année d’études en France lui permirent d’élargir son répertoire alors que son travail s’orientait de plus en plus vers une subtile abstraction picturale.
La mort inattendue de Humphrey en 1967, au sommet de sa carrière et au milieu de sa première exposition itinérante nationale, a interrompu la promesse d’une place éminente et influente dans l’art canadien. L’intérêt pour Humphrey et son œuvre renaît… les préoccupations et les réalisations de sa créativité fascinante demeurent actuelles et continuent de transmettre des messages évocateurs d’identité et de lieu, aussi pertinents aujourd’hui qu’ils l’étaient il y a près d’un siècle.